Réponse de Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères à la question parlementaire de Monsieur le député Patrick Santer concernant l’exclusion éventuelle des pays membres de l’Union Européenne, notamment le Luxembourg du «Visa Waiver Programme

L’Honorable Député fait référence au Visa Waiver Program américain qui permet aux ressortissants de certains pays de voyager sans visa aux Etats-Unis pour un séjour ne dépassant pas 90 jours. Tous les anciens États membres de l’Union européenne sauf la Grèce bénéficient de ce programme ainsi que la Slovénie.

L’adhésion au Programme repose sur un certain nombre de critères que les pays membres doivent remplir: les passeports des citoyens doivent être lisibles à la machine et les pays doivent avoir mis en place un programme de passeports biométriques; les États doivent fournir dans un délai raisonnable les informations sur des passeports perdus ou volés; le taux de refus de visas par les autorités américaines aux citoyens d’un pays doit avoir été inférieur à 3 % avant l’adhésion au Programme; le nombre de citoyens du pays qui ont dépassé le temps autorisé de séjour doit être bas; les pays concernés doivent accorder la réciprocité aux citoyens américains et donc ne pas leur imposer de visas; le Département de la Sécurité intérieure doit, dans une appréciation politique, déterminer que la participation d’un pays au Programme n’a pas d’impact négatif sur les intérêts américains en matière de sécurité. Les pays membres du Visa Waiver Program sont évalués tous les deux ans et l’administration peut exclure un pays si elle constate que les critères ne sont plus remplis.

Depuis l’adhésion à l’UE de dix nouveaux États membres le 1er mai 2004, suivi par celle de deux autres nouveaux États membres le 1er janvier 2007, l’Union européenne intervient régulièrement auprès des autorités américaines pour obtenir l’inclusion dans le Visa Waiver Program des 12 États membres de l’DE qui n’en sont pas encore membres, en vertu des principes de mutualité et de réciprocité sur lesquels est fondée la politique communautaire en matière de visas. Le sujet est abordé dans les contacts de l’Union européenne à tous les niveaux, en particulier lors des sommets annuels UE – Etats-Unis. Lors du dernier sommet du 30 avril 2007, le sujet a pareillement été évoqué, et la déclaration conjointe adoptée par les dirigeants mentionne la volonté commune d’arriver rapidement à une situation dans laquelle tous les citoyens de l’UE peuvent voyager aux Etats-Unis sans visa: “We aim at swift progress in achieving visa-free travell for all EU citizens to the United States consistent with the us. proposal to strengthen the security of its Visa Waiver Program and accelerate the expansion of visa-free travel, which is an important step forward in facilitating travel between the United States and Europe.”

Au vu de ce qui précède, on ne peut donc parler de divisions européennes sur ce sujet comme suggéré par l’article du Figaro du 2 juin dernier auquel l’Honorable Député fait référence.

Les Etats-Unis sont conscients de la volonté européenne de voir les 12 États membres concernés intégrés en bloc dans le Visa Waiver Program, mais ils examinent les demandes de ces 12 États membres au cas par cas et ont jusqu’à présent proposé des feuilles de route à ces États pour les aider à se qualifier plus rapidement pour le Programme. Alors que c’est la Commission qui traite avec les Etats-Unis dans ce dossier, dans le cadre de la politique communautaire de visas, il est vrai que les États membres qui recherchent une adhésion au Visa Waiver Program sont engagés parallèlement dans des discussions bilatérales avec les Etats Unis dans le contexte du processus par feuilles de route proposé par Washington.

L’article du Figaro fait référence aux réformes du Visa Waiver Program actuellement en cours à Washington. Au Congrès, il y a eu plusieurs initiatives pour modifier les critères d’admission au Visa Waiver Program et notamment celui relatif au taux de rejets de demandes de visas inférieur à 3%. Des membres du Congrès et sénateurs sensibles aux demandes, surtout des pays d’Europe centrale, sont à l’origine de plusieurs projets de loi qui sont sous examen à la Maison des Représentants et au Sénat, et qui ont, au cours des lectures successives, été modifiées à plusieurs reprises déjà. Parallèlement, l’Administration, et notamment le Département pour la Sécurité intérieure, cherche des voies pour concilier un niveau élevé de protection des frontières américaines et l’ouverture nécessaire de ces frontières pour ne pas entraver les affaires et le tourisme. Le Secrétaire à la Sécurité intérieure Chertoff propose ainsi de rendre les critères d’adhésion au Visa Waiver Program plus flexibles pour l’ouvrir à de nouveaux États, mais de renforcer en même la sécurité des Etats- Unis, par exemple en couplant la participation à ce Programme à une obligation, pour chaque voyageur, d’obtenir une autorisation de voyage électronique préalablement à son départ pour les Etats-Unis, et peut-être aussi tôt que 48 heures avant le départ. L’Australie applique déjà un système comparable.

Le Commissaire pour la Justice et les Affaires intérieures Franco Frattini a indiqué, dans une réaction initiale à la proposition du Secrétaire Chertoff, que si ce système d’autorisation de voyage électronique était une façon rapide et non-bureaucratique pour faciliter l’entrée aux Etats-Unis, il n’y voyait pas forcément d’inconvénient. C’est à cette autorisation de voyage électronique que l’Honorable Député veut probablement faire allusion lorsqu’il parle d’obligation de visa avant l’entrée aux Etats-Unis. Selon les autorités américaines, il ne s’agirait pas d’un visa en tant que tel, mais d’un enregistrement des données contenues dans le passeport du voyageur qui permettrait aux autorités américaines de vérifier l’identité de personnes qui projettent de se rendre aux Etats-Unis et de leur communiquer la décision sur leur admission, qui est jusqu’à maintenant prise par l’officier d’immigration à leur port d’entrée, avant même leur départ.

Selon M. Chertoff, l’administration américaine n’aurait pas l’intention d’abolir le Visa Waiver Program, mais simplement de le réformer. Il faudra bien évidemment, le moment venu, étudier de près les critères réformés du Visa Waiver Program pour déterminer si les États qui sont actuellement membre du Programme voient leur adhésion remise en question ou doivent se requalifier pour continuer de rester membre. Toutefois, comme le Grand-Duché de Luxembourg répond à ce stade pleinement aux critères définis dans le cadre du Visa Waiver Program (passeports lisibles à la machine, programme de passeports biométriques, information sur les documents de voyage en circulation au Grand Duché, transmission en temps utile des données sur les passeports perdus ou voles … ), il n’existe actuellement aucune raison pour que nos ressortissants ne continuent pas à bénéficier du Visa Waiwer Program.

Concernant le maintien de « situations de non-réciprocité par certains pays tiers en matière d’exemption de visa », il a été décidé lors du dernier Conseil JAl les 12 et 13 juin 2007 que la Présidence UE et la Commission continueront à entretenir un dialogue renforcé avec les Etats- Unis d’Amérique en vue d’obtenir le respect du principe de réciprocité en matière de visa envers tous les États membres de l’Union européenne.

Comme le Congrès américain n’a pas encore formulé de position définitive relative à cet amendement de la législation en matière d’immigration, la Commission a par ailleurs annoncé que la présentation de son troisième rapport en matière de réciprocité ne se fera qu’à partir du mois de septembre prochain. Rappelons que la Commission avait noté dans son deuxième rapport du 3 octobre 2006 qu’aucun élément de progrès tangible n’avait pu être enregistré en ce qui concerne les discussions avec les Etats-Unis d’Amérique et que des mesures appropriées à l’égard de ces derniers pourraient être envisagées en vue d’accélérer les progrès en direction de la réciprocité.

Au vu des débats en cours et sur une éventuelle réforme du Visa Waiver program et sur le respect du principe de réciprocité, il est toutefois prématuré de discuter d’éventuelles mesures restrictives en matière de visa à l’égard des citoyens américains.

Zréck