Jean-Louis Schiltz: Loyer social ou loyer injuste?

L’approche du parti socialiste en matière de bail à loyer n’est pas sans susciter une certaine perplexité

? Question parlementaire récente de Mme Lydie Mutsch:«Les loyers exorbitants sont souvent inaccessibles aux personnes touchant le salaire social minimum»

? Question parlementaire posée cinq jours plus tôt par M. Ben Fayot:«Les dispositions de la loi (concernant la fixation des loyers des logements) font subir aux propriétaires des injustices

légales»

Il faudra savoir ce que l’on veut: Les loyers sont-ils exorbitants pour les locataires ou sont-ils injustement bas pour les propriétaires? Le constat de départ est contradictoire. Force est de se demander comment à partir de ce constat contradictoire le parti socialiste arrivera à articuler une approche politique coordonnée et conséquente en la matière

Les socialistes veulent-ils à l’instar de ce que Mme Mutsch suggère – qu’on légifère pour éviter qu’à l’avenir les locataires n’aient à subir des loyers jugés excessifs? Ou alors, veut-on plutôt – comme le suggère M. Fayot – libéraliser la matière et autoriser des loyers plus élevés correspondant, selon le critère proposé, à la valeur de marchande du bien loué

A la décharge de M. Fayot, il échet de noter qu’il semble, limiter sa critique à la protection «socialement injuste» des «locataires à niveau de revenu élevé». Cette réserve n’est cependant pas de nature à remettre en cause le constat de base qui reste empreint de contradiction. D’un côté, l’on propose une protection accrue du locataire. D’un autre côté, l’on préconise une politique de libéralisation, plus favorable aux propriétaires-investisseurs.

En réalité, la politique en matière de logement n’est pas une politique où l’objectif premier est de promouvoir l’investissement. Bien sûr l’on peut discuter du bien-fondé des critères légaux en matière de fixation du loyer, mais la politique en la matière doit rester une politique sociale, une politique d’accession à la propriété, une politique de recherche d’équilibres entre intérêts opposés.

Vouloir réduire la politique en matière de logement à une politique d’investissement est forcément réducteur, voire anti-social. Ceci ne veut pas pour autant dire qu’il n’y a pas de possibilités d’investissements en matière immobilière. Il échet de rappeler en particulier que les loyers des immeubles commerciaux et ceux des maisons maîtres ne sont pas limités par la loi: la loi du marché joue dans ce cas

L’on suivra avec intérêt la suite du débat (ou, faut-il dire du cafouillage?) entre Mme Mutsch et M.

Fayot

A l’heure actuelle, l’approche n’est en tout cas pas une approche profondément et résolument social(ist)e. Cela n’est d’ailleurs guère étonnant, si l’on se rappelle qu’à l’occasion du congrès du POSL au mois de janvier, plusieurs voix se sont élevées pour réclamer que le parti socialiste devrait «retrouver le social»

Apparemment, l’on continue de chercher …

*Jean-Louis Schilt Secrétaire général