Privilégier les actions concrètes

En vertu du tour de rôle instauré dans le cadre de la coopération transfrontalière, la présidence du 11e Sommet de la Grande Région est exercée par le Grand-Duché de Luxembourg depuis le 1er février 2008 pour une durée de 18 mois. Le Ministère d’Etat et le Ministère de l’Intérieur et de l’Aménagement du Territoire seront responsables de la présidence. Interview avec Jean-Marie Halsdorf, ministre
luxembourgeois de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire. Soziale Fortschrëtt, Octobre 2008

Monsieur Halsdorf, quel est le rôle du Ministre de l’Intérieur en ce qui concerne le problème de la mobilité des frontaliers? 

Le thème principal de notre présidence est axé autour de la thématique de l’espace concernant aussi bien le développement territorial que la planification territoriale. En ce sens, il va sans dire que toute la thématique, ou je dirais même, que toute la problématique des transports est une de mes préoccupations majeures. 

Au niveau interne, càd au Luxembourg, le Ministère de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire est responsable – conjointement avec les ministères des Transports, des Travaux Publics, de l’Environnement, les CFL et de l’administration des Ponts & Chaussées – de l’élaboration du plan sectoriel Transports. 

Ce plan doit bien évidemment prendre en considération l’aspect transfrontalier. Cette prise en considération est primordiale quand on sait que 144.000 frontaliers passent chaque jour la frontière luxembourgeoise pour venir travailler chez nous et elle encore davantage quand on sait que le pourcentage de frontaliers ayant recours aux transports en commun est beaucoup trop faible. En effet, la plupart des travailleurs frontaliers n’utilisent pas les transports publics de sorte que le partage modal, largement en faveur de la voiture privée, est resté stable entre 2003 et 2007: 84,8% en 2003 et 83,5% en 2007 pour le recours à la voiture. 

En somme, le problème des transports au Luxembourg est un problème qui doit être abordé sous un aspect grandrégional et c’est précisément sous cette approche que nous traitons cette problématique dans le cadre de notre présidence. Ainsi, nous avons organisé avec le Comité économique et social de la Grande Région (CESGR) le 20 mai dernier une conférence de haut niveau sur les transports. 

Plusieurs pistes intéressantes y ont été dégagées par le CESGR, pistes qui sont actuellement à l’étude et qui concernent, entre autres, une mise en ligne des horaires, l’introduction d’un système tarifaire unique avec la possibilité de créer une agence transfrontalière des transports dans la Grande Région, en fait un Verkéiersverbond Groussregioun. Je suis confiant que des propositions plus concrètes seront présentées lors du 11e Sommet de la Grande Région. 

Je suis cependant d’avis, en tant que ministre de l’aménagement du territoire, que la politique des transports joue un rôle primordial pour un développement territorial intégratif de la Grande Région. Le renforcement et l’amélioration des infrastructures de transports – routières, ferroviaires, fluviales et aéroportuaires – dans, vers et de la Grande Région constituent un élément essentiel pour le développement socio-économique de notre espace de coopération. Mon rôle consiste donc à mettre en place, avec les acteurs responsables du domaine des transports aussi bien au Luxembourg que dans la Grande Région, une approche intégrative qui prenne en compte l’ensemble des aspects essentiels visant une meilleure coordination et cohérence en la matière. 

Quel est l’avenir des zones industrielles transfrontalières? 

Je pense effectivement qu’il est opportun de réfléchir concrètement à la création de zones industrielles ou économiques transfrontalières. C’est également un sujet qui est inscrit à l’ordre du jour de nos réflexions. Cependant, il faut savoir qu’une telle idée n’est pas neuve puisque le Pôle Européen de Développement a eu pour but de lancer de telles réflexions. Dans le monde globalisé que nous connaissons et eu égard au développement de la coopération transfrontalière ces dernières années, il est indubitable que ce sujet mérite encore davantage d’attention. Mais, je vous avoue que même si je suis, en tant ministre de l’aménagement du territoire, en faveur de telles initiatives – pour autant qu’elles s’insèrent dans le cadre d’une politique de développement territorial structuré, cohérent et intégré –, celles-ci doivent néanmoins être lancées par les acteurs compétents en la matière. Vous me demandez quel est l’avenir de telles zones? Moi, je vous réponds que, précisément, l’avenir de la Grande Région en matière de développement économique passe certainement, entre autres, par la création de zones d’activités économiques transfrontalières qu’elles soient bi-tri- ou multilatérales.

Pouvez-vous nous citer quelques exemples concrets qui démontrent le bon fonctionnement de ces relations transfrontalières? 

Le projet METROBORDER précisément ne peut se faire que sur base d’une coopération approfondie avec les communes de la Grande Région. Il s’agit donc d’un premier exemple. 

Un autre exemple concerne un projet également d’envergure dans lequel des communes de part et d’autre des frontières sont impliquées: à savoir la création d’un GECT (Groupement européen de coopération territoriale) sur le territoire d’Alzette-Belval. En effet, depuis 2006, la réglementation européenne offre aux collectivités territoriales et aux Etats la possibilité de se regrouper au sein d’une structure dotée d’une personnalité juridique et d’une autonomie financière qui vise à organiser et à gérer des actions de coopération.
 
L’Etat luxembourgeois et les quatre communes luxembourgeoises de Esch-sur-Alzette, Sanem, Mondercange et Schifflange ensemble avec l’Etat français et la Communauté de communes du Pays-Haut Val d’Alzette ont ainsi décidé au mois de juillet dernier de réfléchir conjointement à la perspective de constituer une éco- agglomération transfrontalière équilibrée, donc un GECT. 

Je pense qu’il est également opportun de réfléchir à la création d’autres GECT avec nos autres voisins belge et allemand dans un avenir proche. Mais d’abord, concentrons-nous sur le projet METROBORDER et sur la création du GECT d’Alzette-Belval. Je suis quelqu’un qui privilégie les actions concrètes, nous en avons actuellement deux de grande envergure et qui trop embrasse mal étreint.

Source: Soziale Fortschrëtt, Octobre 2008