Une question parlementaire de Monsieur le député Laurent Mosar à Monsieur le Ministre de la Justice
Monsieur le Président,
J’ai l’honneur de vous informer que, conformément à l’article 80 du règlement de la Chambre des Députés, je souhaiterais poser une série de questions à Monsieur le Ministre de la Justice concernant un arrêt récent rendu par la Cour européenne des droits de l’homme dans une affaire Laghouati dans laquelle le Luxembourg a été condamné sur base de l’article 6 et 13 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales.
En août 1993, Monsieur Belkacem Laghouati fut victime d’un accident du travail mortel sur un chantier sis à Differdange. Le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, rendit son jugement en date du 5 février 2004, soit plus de dix ans après la disparition tragique de Monsieur Laghouati. Les prévenus (le responsable et le chef du chantier en cause) furent condamnés au pénal, alors que les demandes des parties civiles à voir réparer leur préjudice moral résultant des douleurs endurées par le de cujus décédé deux heures après l’accident furent rejetées. Quant aux demandes des parties civiles à voir indemnisé leur dommage moral causé par la perte tragique du de cujus, seules les demandes des frères et sœurs du de cujus furent déclarées recevables.
Les requérants ayant interjeté appel en date du 11 mars 2004, la Cour d’Appel de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, rendit son arrêt en date du 22 mars 2005 dans lequel elle se déclara incompétente pour statuer sur les demandes civiles des requérants. Ces derniers saisirent la Cour européenne des droits de l’Homme qui vient de condamner le Luxembourg par arrêt du 5 avril 2007 sur base de l’article 6 § 1 (délai raisonnable) et 13 (droit à un recours effectif) de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme sub-mentionnée.
La Cour a plus particulièrement estimé que si la procédure revêtait sans aucun doute une certaine complexité, notamment au regard de la procédure parallèle relative à la plainte pour faux témoignage et à la nécessité de procéder par des commissions rogatoires internationales, elle ne saurait cependant considérer comme raisonnable un laps de temps supérieur à 9 ans, surtout si, au final les autorités judiciaires se sont déclarées incompétentes pour statuer sur la demande civile des requérants. Elle a également considéré que les requérants ne disposaient pas en l’espèce d’un recours effectif pour se plaindre de la durée de la procédure.
Cette affaire soulève de nouveau la question de la rapidité de la justice à rendre une décision et partant met en cause l’efficacité des règles de procédure ainsi que la compétence et les effectifs de la magistrature.
Dans ce contexte, j’aurais souhaité poser les questions suivantes à Monsieur le Ministre de la Justice :
- Quelle est la position du gouvernement dans ce dossier ?
- Entend-il modifier les règles procédurales afin d’aboutir à des décisions juridictionnelles plus rapides ?
- Plaide-t-il pour une formation accrue des magistrats afin qu’ils soient à même de gérer des dossiers de plus en plus complexes et techniques ?
- Ne pense-t-il pas qu’il faille augmenter le nombre de magistrats ? Dans le même contexte, n’estime-t-il pas que les magistrats devraient disposer d’un personnel administratif plus qualifié (à noter que beaucoup d’employés auprès des juridictions ne disposent d’aucune compétence particulière et certains sont embauchés sous forme de CDD voire de CAT) ?
- Ne faudrait-il pas revoir également les règles de coopération internationale afin que notamment les commissions rogatoires puissent être exécutées dans des délais corrects ?
- En tout état de cause, quels sont les moyens que le gouvernement entend mettre en œuvre afin de rendre la justice plus rapide ?
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma parfaite considération.
Laurent Mosar
Député