Le ministre du Travail et de l’Emploi, François Biltgen, au sujet de l’âge de la retraite et de l’accès au travail des plus de 50 ans
Luxemburger Wort: Monsieur le ministre, la France est en plein débat sur l’âge de la retraite. Qu’en est-il au Grand-Duché?
François Biltgen: C’est un débat que je souhaite favoriser au Luxembourg. Cependant, à mon avis, discuter de l’âge est une mauvaise approche. Il faut plutôt parler de travail tout au long de la vie. Combien de temps a-t-on travaillé avant de pouvoir faire valoir ses droits à la retraite? Dans quelles conditions? Le taux d’emploi des personnes âgées, relativement bas dans notre pays, est en phase ascendante, alors que le taux de chômage augmente pour cette catégorie d’âge.
La baisse significative du taux de chômage, enregistrée récemment, a essentiellement profité aux jeunes générations. L’âge de la retraite n’est qu’un élément du débat. Il s’agit également d’évoquer l’avenir de nos systèmes de pensions. C’est ce que nous faisons au sein du "Rentendësch", en commun avec le ministre de la Sécurité sociale.
Luxemburger Wort: Que faire pour garantir l’accès au travail des plus de 50 ans?
François Biltgen: Maintenir ou réintégrer les personnes âgées dans l’emploi nécessite une combinaison de solutions. La discussion sur l’âge de la retraite ne résoudra pas le problème du chômage des personnes âgées. C’est la raison pour laquelle nous avons mis en place un certain nombre d’aides, notamment le remboursement des cotisations sociales pour les entreprises embauchant des collaborateurs ayant plus de 45 ans.
Il y a parallèlement un problème d’employabilité, c’est-à-dire de qualification professionnelle et d’adéquation avec le marché du travail.
La nouvelle loi sur le droit individuel à la formation professionnelle continue permet à chaque salarié de prendre 80 jours dans sa vie active, sur le compte de l’Etat, pour parfaire ses connaissances. Il y a également un travail de sensibilisation à faire au niveau de la mentalité des entreprises qui hésitent à engager des personnes âgées ou, le cas échéant, à les maintenir dans leur emploi. À cet effet, la loi dite "5611" du maintien dans l’emploi favorise la reconversion professionnelle afin d’offrir aux personnes licenciées un nouvel emploi, plutôt que des indemnités de licenciement.
Luxemburger Wort: Faut-il faire du jeunisme, ou privilégier l’expérience?
François Biltgen: On entre dans une période où la main d’oeuvre va se raréfier. Il faut donc faire appel à toutes les ressources humaines, quel que soit l’âge des travailleurs. Par ailleurs, de nombreuses entreprises n’ont pas suffisamment investi dans la formation de leurs collaborateurs, ne valorisant pas suffisamment l’évolution d’une carrière et l’expérience professionnelle, en préférant puiser dans le vivier des employés potentiels de la Grande Région.
Luxemburger Wort: Qu’envisagez-vous pour vous-même?
François Biltgen: C’est une décision qui se détermine en fonction de plusieurs facteurs, l’aspect financier, n’étant qu’un des éléments de la prise de décision. Il me parait que le bien-être au travail, et l’intérêt de la tâche à réaliser, sont des éléments prépondérants à prendre en compte. Aimer son travail peut évidemment inciter à prolonger la durée de la vie active.
Source: Luxemburger Wort, 7 mai 2008, Gérard Karas