«La transparence totale n’est pas un luxe, mais une nécessité»

Jean-Louis Schiltz et le financement des partis. Lisez une interview, publiée au Journal «La Voix du Luxembourg».

La Voix: En prenant l’initiative d’une proposition de loi, les libéraux ont pris les autres partis à contre-pied?

Jean-Louis Schiltz: Ce n’est pas un contre-pied mais plutôt une surprise de voir les libéraux s’atteler à un tel projet alors que les mandataires de ce parti s’étaient traditionnellement prononcés contre une loi sur le statut et le financement des partis.
Au CSV, nous y sommes prêts depuis belle lurette puisque ce point figurait déjà dans notre programme électoral de 1994 et que nous avions repris l’initiative fin 2002-début 2003 mais rien ne s’était fait car les libéraux s’opposaient à une réglementation des finances des partis.

Quels sont les principes de base que le CSV entend voir figurer dans un tel dossier?

Jean-Louis Schiltz: Nous sommes prêts à voter demain une loi si elle répond à trois principes: Tout d’abord la transparence totale, qui n’est pas un luxe mais une nécessité. Les dons aux partis doivent être rendus publics et limités à des montants très bas, par exemple avec un plafond à 1.000 euros. Nous sommes opposés aux dons anonymes.
Enfin, en troisième lieu, les partis constituant des éléments indispensables dans le processus démographique, nous ne nous opposons pas à un financement public partiel. Mais il ne serait pas bon que les partis vivent exclusivement des deniers publics. Leurs ressources doivent aussi venir des contributions des membres et des mandataires.

Mais la publication de la liste des donateurs ne va-t-elle pas décourager les bonnes volontés?

Jean-Louis Schiltz: L’anonymat correspond à un manque de transparence et nous voulons éviter les tricheries. Regardez en Allemagne avec Möllemann. Il a contourné les règles en divisant les dons pour qu’ils restent en dessous du plafond à partir duquel l’anonymat était rompu. Nous n’avons pas de réponse à de tels comportements, voilà pourquoi nous devons rester stricts.

Aucun don anonyme, donc?

Jean-Louis Schiltz: Il est clair que si l’on parle de 100 euros, l’anonymat est possible. Mais dès qu’il s’agit de montants plus conséquents, comme 1.000 euros, l’anonymat n’est plus permis.

Quel fut le don le plus élevé pour le CSV en 2003 ?

Jean-Louis Schiltz: Je m’attendais à cette question. J’ai posé la question à notre trésorier. Il s’agit de 2.500 euros, venant d’un privé.

Si j’ai bien compris, le cavalier seul du DP réduit les chances d’aboutir à un accord?

Jean-Louis Schiltz: L’initiative intempestive du DP ne facilite pas les choses, c’est vrai car nous avons jusqu’ici tenté d’aboutir à un consensus. Mais nous n’excluons pas des discussions plus constructives. Tous les partis doivent alors jouer franc jeu.

L’un des deux volets de l’accord passé entre les partis pour la campagne électorale a trait au fair-play. Y croyez-vous ?

Jean-Louis Schiltz: On verra bien si l’accord tient jusqu’au bout. Nous avions déjà signé un accord analogue en 1999. Cela n’a pas empêché des débordements pendant les dernières semaines de la campagne, certains préférant jouer l’homme ou la femme plutôt que le ballon.

Nous parlons tout le temps des finances des partis. D’où vient l’argent du CSV?

Jean-Louis Schiltz: Il s’agit en premier lieu des remboursements prévus par la loi en fonction du nombre de députés. Puis des contributions des membres et mandataires et enfin des dons. Ils représentent en général moins de 10% par an. Dans le futur projet de loi, je n’exclus pas que l’on puisse trouver une formule de compromis autorisant des dons anonymes plus élevés si les dons n’excédent pas les 5 à 10% des ressources globales du parti. Pourquoi pas. Mais je vous avoue préférer la transparence totale.

J’imagine que vous êtes favorablement à un statut des partis.

Jean-Louis Schiltz: Cela fait partie de nos propositions. Je suis d’accord avec Jean-Paul Rippinger lorsqu’il fait inscrire dans son initiative que les partis doivent avoir des structures démocratiques. Ce serait déjà un grand pas en avant si les partis bénéficiaient enfin d’une base légale à travers une loi.

Et leur ancrage dans la Constitution?

Jean-Louis Schiltz: Je n’ai pas d’avis définitif sur la question mais un préjugé favorable .

Interview publiée le mardi 10 février au quotidien «La Voix du Luxembourg». Propos recueillis par Jean-Marie Denninger, journaliste