Double nationalité, nouvelle politique d’immigration – le besoin d’un débat objectif

Marc Spautz, Secrétaire Général du LCGB et Député du CSV se prononce pour l’introduction de la double nationalité tout en la liant à certaines conditions
Au cours des dernières semaines et au regard du projet de loi sur la double nationalité, les débats se sont intensifiés au Luxembourg. De nombreux Luxembourgeois se posent une série de questions à ce sujet, et ceci à tort ou à raison, selon les points de vues d’un chacun.

Sans entrer dans les détails du projet de loi, certaines réflexions s’imposent.

Tout d’abord, il convient de saluer le fait que le gouvernement luxembourgeois s’est décidé d’introduire la double nationalité. Dans une société marquée depuis des années par un pourcentage croissant de concitoyens d’origine étrangère, dans un pays dont la population croît grâce à l’immigration, cette décision procède d’une certaine logique.

Il est juste d’accorder la nationalité luxembourgeoise à ceux qui vivent et travaillent au Luxembourg et qui contribuent à sa richesse, tout en leur permettant de maintenir leur nationalité d’origine. Il est tout aussi naturel que des conditions soient liées à cette possibilité.

L’une ou l’autre de ces conditions fait aujourd’hui l’objet d’un débat plus animé. Cela se voit surtout dans les lettres des lecteurs dans les grands quotidiens et cela s’entend dans les discussions au bistrot. C’est compréhensible. Mais il n’est pas compréhensible que les concepts de la nation et des sentiments nationaux sont invoqués pour donner une expression à une peur diffuse, une inquiétude d’être submergé par l’étranger. Il faut s’y opposer fermement.

Un mot-clé : la langue

Un mot-clé : la langue. Il est juste d’exiger des futurs Luxembourgeois de comprendre et de parler notre langue. Mais il semble exagéré que les nouveaux citoyens doivent mieux écrire le luxembourgeois que ne le savent faire les Luxembourgeois de souche. Il s’agit de trouver un compromis raisonnable. Notre langue n’a évolué qu’au cours des dernières années vers une langue écrite. Il faut aussi considérer le fait que le luxembourgeois n’est devenu une langue nationale et officiellement reconnue qu’à partir de 1984. C’est la raison pour laquelle il semble normal que tous ceux qui habitaient le Grand-Duché avant cette date ne doivent pas être concernés par le critère de la langue.

Dans ce contexte, le gouvernement doit être conscient de son obligation d’offrir des cours de langues en nombre suffisant et dans le respect des coûts et des horaires.

Si le projet de loi relatif à la citoyenneté luxembourgeoise et à la double nationalité sera adopté, nous devons immédiatement faire face à un nouveau débat : celui sur la politique d’immigration. A considérer les discussions que nous avons vécues au sujet du droit de séjour restreint des demandeurs d’asile, on peut s’attendre à un débat mouvementé.

Mais il faut savoir qu’aucun chemin ne permet d’éviter une nouvelle politique de l’immigration. Si le Luxembourg (et l’Europe) ne parviennent pas à définir de nouvelles priorités dans leurs politiques d’immigration, le facteur démographique aura tôt fait de nous rejoindre. Et ne parlons pas de la pression qui émane de l’immigration clandestine en provenance des différentes régions de crise en Afrique p.ex.

Le Luxembourg a besoin d’immigration – et pas seulement d’une immigration en provenance des pays d’Europe. Déjà de nos jours nous sommes confrontés à un manque flagrant de main d’oeuvre qualifiée. Et recruter dans la Grande Région aura des limites – il suffit de voir le chaos quotidien provoqué sur nos routes. Ce n’est pas le résultat souhaité.

Nous devrions songer dans les deux débats, à ce qui caractérise aussi notre pays : le Luxembourg est un pays qui offre à chacun qui le souhaite une patrie sans donner à l’étranger le sentiment d’être non désiré. Jusqu’ici, le Luxembourg et ses habitants ont toujours réussi plus ou moins bien d’intégrer les immigrants. Des immigrants dont notre économie a d’ailleurs eu besoin.

Un plus d’immigration serait souhaitable. La double nationalité est un pas dans la bonne direction. Un deuxième pas devra être celui d’une nouvelle politique d’immigration.

Marc SPAUTZ, Secrétaire général du LCGB

Source: Soziale Fortschrëtt, mars 2007 / www.lcgb.lu

Ci-dessous en format PDF le projet de loi 5620 sur la double nationalité ainsi que les avis de plusieurs chambres professionnelles