Monsieur le Président,
Conformément à l’article 80 du règlement de la Chambre des Députés, je vous prie de bien vouloir transmettre la présente question parlementaire à Madame la Ministre de la Justice et à Monsieur le Ministre des Finances.
Le 26 février 2025, la Cour d’appel du Grand-Duché a rendu un arrêt qui a suscité d’intenses réactions tant dans les milieux juridiques que dans le secteur financier. Dans cette affaire, la Cour a déclaré irrecevables des poursuites pénales engagées à la suite d’une amende administrative infligée par la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF) pour de graves manquements aux obligations de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB/FT). En d’autres termes, la Cour a estimé que le principe du non bis in idem, principe fondamental de l’État de droit selon lequel nul ne peut être sanctionné deux fois pour les mêmes faits, faisait obstacle à une double répression, d’abord administrative puis pénale, pour la même conduite.
Cet arrêt soulève plusieurs enjeux majeurs pour l’architecture répressive luxembourgeoise en matière de criminalité financière et de conformité réglementaire.
Dans ce contexte, je souhaiterais poser les questions suivantes à Madame la Ministre de la Justice et à Monsieur le Ministre des Finances :
Comment le Gouvernement interprète-t-il la portée de l’arrêt du 26 février 2025, notamment en ce qui concerne l’application du principe non bis in idem entre sanctions administratives de la CSSF et poursuites pénales pour les mêmes faits ?
Le Gouvernement estime-t-il que, suite à cette jurisprudence, une sanction administrative infligée à un établissement financier pour des manquements LCB/FT peut désormais faire obstacle à des poursuites pénales ultérieures, y compris contre les dirigeants ou responsables concernés individuellement ?
Quelles mesures de coordination concrètes existent ou seront mises en place entre la CSSF, la CRF et le Parquet afin d’éviter qu’une voie de sanction choisie trop rapidement (administrative) ne rende définitivement impossible l’autre (pénale) dans les cas les plus graves ?
Le Gouvernement considère-t-il que cette situation crée un risque de voir certains acteurs rechercher en priorité une issue administrative, par le paiement d’une amende, afin d’éviter l’exposition pénale ? Si oui, quelles garanties peuvent être apportées pour prévenir ce risque et maintenir l’effet dissuasif du droit pénal ?
Le Gouvernement juge-t-il nécessaire une adaptation législative pour clarifier l’articulation entre sanctions administratives et sanctions pénales en matière de LCB/FT ?
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes salutations distinguées.
Laurent Mosar
Député