Laurent Mosar: “Construire 1.000 nouveaux logements d’ici six ans”

Interview avec Laurent Mosar
Le chrétien-social Laurent Mosar est le principal challenger de Lydie Polfer pour le fauteuil de bourgmestre de la capitale. Cet avocat de 47 ans fut élu pour la première fois en 1994 à la Chambre des députés; il en est actuellement le vice-président. Entré au conseil communal de Luxembourg en 1997, il en est échevin depuis janvier 2000.

paperJam: Si vous décrochez les clés de l’Hôtel de Ville, le concept de développement urbain établi par le bureau d’urbanisme Zilm constituera-t-il votre outil de travail?

Laurent Mosar: Le concept d’urbanisme qui nous a été soumis par le bureau Zilm constitue une bonne base pour la poursuite du développement de la ville. Il n’est toutefois pas achevé, dans le sens qu’il devra encore faire l’objet d’un débat politique au sein des instances communales et qu’il sera également discuté avec les citoyens de la ville avant de recevoir sa forme définitive. Ce n’est qu’après être passé par l’appréciation des dirigeants et des habitants de la Ville qu’un plan de développement de la Ville et de ses quartiers sera mis en œuvre.

Ce qui est certain, c’est que des règles uniformes et à portée générale devront présider à ce développement, selon qu’il s’agisse des quartiers à vocation purement résidentielle ou alors des quartiers destinés à accueillir des activités nouvelles, notamment des activités économiques. A cet égard, j’estime que le concept du bureau Zilm constitue un excellent instrument de travail..

paperJam: Luxembourg a la fâcheuse réputation d’être une ville morte après 18.00h. Quelles mesures proposez-vous pour que cela change?

Laurent Mosar: Ce n’est pas la Ville qui s’endort toute entière après 18 heures, mais le centre, la ville haute, qui se vide très vite après les heures de bureau et où des mesures destinées à raviver le quartier devront être prises en priorité. A cet égard, nous préconisons une approche d’ensemble, combinant une politique favorisant le logement en Ville haute avec des initiatives précises en matière d’offre culturelle et sociale, du tourisme et de flexibilisation des horaires d’ouverture des magasins du centre-ville.

Une telle politique devra être menée de concert avec les concernés, notamment le City manager, le Luxembourg City Tourist Office et, bien entendu, les commerçants – je suis convaincu qu’un effort commun de tous les intéressés permettra de faire revivre la Ville haute après les horaires de travail habituels.

paperJam: Comment entendez-vous lutter contre l’implantation excessive de bureaux dans les quartiers d’habitations?

Laurent Mosar: Les quartiers résidentiels doivent rester des quartiers résidentiels, et le plan de développement communal que nous entendons mettre en œuvre après sa finalisation confirme cette affirmation. Les quartiers d’habitation ne doivent dès lors pas accueillir des activités économiques de toute espèce qui nécessitent des locaux dont le marché du logement se verrait privé.

Aussi souhaitons-nous agir avec détermination afin d’endiguer le phénomène de l’utilisation commerciale de surfaces destinées au logement privé. Ceci est toutefois impossible sans base légale adéquate, et j’insisterai auprès du ministre de l’Intérieur pour que les initiatives nécessaires soient prises dans les tous meilleurs délais. Je m’emploierai en faveur d’une surveillance conséquente de l’usage réel qui est fait des surfaces habitables destinées à accueillir des logements de particuliers.

paperJam: Que faut-il mettre en place pour atteindre un modal split de 25% d’ici 2020?

Laurent Mosar: En ville de Luxembourg, le modal split est de 33/67 – un tiers des mouvements de personnes sur le territoire de la Ville sont d’ores et déjà effectués par les transports en commun. Cet état des choses est dû largement au service excellent offert par les autobus de la Ville de Luxembourg. La capitale n’est donc pas trop concernée par les efforts qui doivent être entrepris au niveau national afin de porter le modal split national de 12/88% actuellement à 25/75%.

Cela étant, nous considérons l’amélioration de la mobilité des habitants de la ville – et celle de la mobilité en ville en général – comme un sujet prioritaire, et notre programme pour les élections communales contient les mesures que nous estimons nécessaires et utiles à cette amélioration. Je ne citerai que le raccordement des grands campus scolaires de Limpertsberg et du «Geesseknäppchen» au chemin de fer, et un délestage du trafic d’autobus en plein centre de la Ville. Les quartiers destinés à un développement économique plus poussé, le Kirchberg et la « Cloche d’Or » notamment, devront également être rendus accessibles par rail.

paperJam: Si la ville se développe par quartiers thématiques, pour rapprocher les lieux de travail du domicile, comment parvenir à maintenir une mixité sociale?

Laurent Mosar: Une affirmation importante de notre programme pour les élections communales est que tous les quartiers de la ville sont des quartiers pour vivre. Dans cet ordre d’idées, il est évident que même les quartiers dont le développement économique sera plus accentué au cours des années à venir continueront d’accueillir des habitants, de toutes les couches sociales.

D’ailleurs, notre programme en faveur du logement – 1.000 logements à prix abordable nouveaux devront être construits au cours des six prochaines années – prévoit que ces habitations seront implantées dans l’ensemble des quartiers de la ville, et que nous nous engageons à une développement des quartiers qui évite toute ghettoïsation. Je suis persuadé que cette politique sera une réussite, d’autant plus qu’elle comportera une action résolue destinée à l’endiguement de la spéculation immobilière et foncière.

paperJam: Quelles stratégies faut-il développer pour soutenir le commerce de proximité?

Laurent Mosar: Le commerce de proximité, que nous appelons généralement le commerce « de quartier », doit être soutenu afin qu’il puisse se maintenir et se développer sur tout le territoire de la Ville. Il est un facteur important de la vie et de la cohésion sociale dans les quartiers. Dès lors, il faudra en garantir l’accès par tous les moyens de transports – public surtout – et prendre soin pour que le commerce de quartier trouve des locaux à prix abordables, à proximité de ses clients.

L’abaissement du taux communal de l’impôt commercial communal à 225 points (soit une baisse du taux d’impôt global des entreprises de 30,38% à 29,67%, ndlr) affecte le commerce de quartier dans une certaine mesure, mais ce n’est pas là le principal souci de ce genre d’activité. Je penche plutôt vers une politique qui facilite l’implantation proprement dite du commerce de proximité, avec les moyens de la politique communale.

paperJam: Afin de désengorger le Limpertsberg, la ville devrait-elle se doter d’un «plan sectoriel lycées» et contraindre les élèves à fréquenter des lycées de proximité implantés dans chaque quartier?

Laurent Mosar: Il existe un plan sectoriel «Lycées» national destinée à la mise en œuvre par l’Etat, et la ville de Luxembourg facilite cette mise en œuvre moyennant, notamment, l’identification d’emplacements adéquats pour l’implantation de lycées sur son territoire. D’ailleurs, il est d’ores et déjà acquis que certains lycées actuellement situés au Limpertsberg seront transférés vers d’autres quartiers de la ville, afin de désengorger le Limpertsberg.

L’implantation de lycées dans tous les quartiers ou presque de la Ville serait pourtant illusoire – et ne servirait à rien. La ville de Luxembourg accueille des milliers de lycéens qui n’habitent pas la capitale, et qui sont pourtant scolarisés sur son territoire. Les campus scolaires du Limpertsberg et du «Geesseknäppchen» devront recevoir un raccordement efficace au rail, de manière à ce que le trafic d’autobus rendu nécessaire par le transport d’élèves puisse être allégé de manière substantielle. En dehors de cela, il est concevable que la Ville oriente les lycéens qui habitent dans la capitale vers l’un des campus plutôt que vers l’autre.

paperJam: Que faut-il faire pour redonner son sens au parc de la ville et y réduire le sentiment d’insécurité?

Laurent Mosar: Le parc a toujours son sens, ce n’est que le sentiment de sécurité qui y règne – surtout à certaines heures – qui en limite la portée. Dès lors, nous sommes attachés à renforcer ce sentiment, et la sécurité réelle de ceux qui fréquentent le parc, notamment en y installant des caméras de surveillance et en renforçant les patrouilles de la police.

En outre, je suis d’avis qu’il faut clôturer le parc, du moins certaines parties, et le collège échevinal a d’ailleurs déjà pris une décision dans ce sens. D’ailleurs, dans la mesure où les compétences des agents communaux seront étendues, ces agents pourront également être sollicités en vue d’assurer la surveillance du parc.

Ces mesures, au-delà de leur effet préventif et dissuasif indéniable, permettront également des poursuites plus efficaces des délinquants qui seraient plus difficiles à convaincre. Pour moi, le parc de la Ville doit être un espace de vie et de liberté où tous doivent se sentir à l’aise et en pleine sécurité.

Source : paperJam du 16 septembre 2005